Migration et travail : expériences d’insertion en emploi des professionnels de la santé et des services sociaux formés à l’étranger
Catherine Montgomery, avec Marie-Emmanuelle Laquerre (Département de communication sociale et publique), Lilyane Rachédi (École de travail social), Spyridoula Xenocostas (CIUSSS Centre Ouest de l’île de Montréal) et Marie-Jeanne Blain (CIUSSS Nord de l'île; Université de Montréal)
À l’échelle internationale, un nombre élevé de professionnelles et professionnels de la santé et des services sociaux migrent pour améliorer leurs perspectives en emploi. Cette mobilité est possible en raison d’une pénurie de main-d’œuvre dans le secteur sociosanitaire, laquelle est estimée à un manque d’effectifs de 4,3 millions mondialement. Les professionnelles et professionnels de la santé et des services sociaux formés à l’étranger (PSSFE) sont hautement scolarisés et visent un secteur de travail en demande. Bien que ces éléments soient reconnus comme favorables, l’insertion de ces personnes migrantes ne se fait pas aisément.
La sous-utilisation des expertises, caractérisée de « gaspillage de cerveaux » (brain waste), ne vient pas sans conséquences. Selon le ministère de l’Immigration, les pertes liées à la sous-utilisation des compétences des personnes immigrantes au Québec se chiffrent à 10 milliards de dollars. Bien que plusieurs recherches aient examiné les enjeux d’insertion des personnes immigrantes en général, les enjeux spécifiques au réseau sociosanitaire sont peu explorés, même s’il s’agit de l’un des principaux secteurs d’emploi au Québec.
Afin de favoriser une meilleure intégration au travail dans le réseau sociosanitaire, ce projet de recherche a pour objectif de documenter les expériences d’insertion de deux groupes de PSSFE dans le but d’identifier les ressources de soutien pouvant faciliter leur insertion dans le milieu. En s’intéressant spécifiquement à la période post-embauche, il vise :
- à mieux comprendre les enjeux organisationnels et relationnels de leur insertion professionnelle (stratégies d’adaptation, savoirs et apprentissages acquis, relations de travail, adaptation à la culture institutionnelle);
- et à identifier les actions existantes et potentielles pouvant favoriser et soutenir une meilleure préparation des PSSFE pour intégrer le réseau sociosanitaire et mieux préparer les milieux pour les recevoir.
Dans ce projet, les PSSFE sont considérés comme des personnes porteuses de vécus et de savoirs pouvant être mobilisés dans le processus d’insertion professionnelle, tout en manœuvrant à travers les contraintes inhérentes aux pratiques institutionnelles et aux relations de travail. Les établissements sociosanitaires, pour leur part, sont considérés à la fois comme des espaces négociés où « s’entrechoquent valeurs et normes » et comme des espaces d’opportunité, d’apprentissages et de réseautage.
Étant donné l’importance de l’employabilité des personnes migrantes hautement qualifiées pour les instances gouvernementales et pour les établissements sociosanitaires, un premier impact de cette recherche sera d’apporter une connaissance approfondie des enjeux de l’insertion en emploi des PSSFE. Un autre apport sera d’offrir aux acteurs institutionnels un espace de partage afin de rendre visibles des pratiques intéressantes existantes et de réfléchir à des pistes d’action possible pour faciliter l’insertion des PSSFE dans les établissements.
À lire sur le sujet :
- Le chapitre « Clinical Sociology and Intercultural Praxis for Working with Migrants in the Community : a Tale of Four Projects » (par C. Montgomery, S. Xenocostas et V. Jimenez), publié dans l’ouvrage collectif Community Intervention, dirigé par J.-M. Fritz et J. Rhéaume, 2022, Springer.
- Le mémoire de maîtrise en communication d’Émilie Tremblay (2019) : Mieux comprendre la construction d’un sentiment d’intégration professionnelle dans un contexte de relations interculturelles au Québec : le cas de technologistes médicaux formées à l’étranger.